Eglise Saint Pierre de Mûrs-Erigné

Les archives signalent l’existence d’un édifice dès la fin du 11ème siècle, reconstruit fin 15ème, début 16ème (entre 1510 et 1530), remanié au 18ème et totalement restauré entre 1861 et 1868. Au moment de la Révolution la paroisse est supprimée ; l’église est fermée et tombe plus ou moins en ruine ; en 1802 elle entre dans le patrimoine communal.
Extérieur
La petite porte avec son linteau en pierre en trois parties est témoin de la construction d’origine, soit du 16ème.
Appuyée au mur sud de l’église une galerie couverte permettait les assemblées des paroissiens pour élire les marguilliers (chargés d’administrer les biens de la paroisse) et discuter des querelles locales.
Un petit cimetière se trouvait à l’emplacement du parvis.
Témoin de la période néo-gothique : les colonnettes qui encadrent la porte d’entrée, les rosaces, les 2 fenêtres en lancette à linteau tréflé, à gauche et à droite, ainsi que celle plus ornée percée dans le pignon du bras du transept.
Intérieur
Le plan de l’église est celui d’une croix latine, avec légère déviation du chœur et de l’abside vers la gauche pour rappeler l’inclinaison de la tête du Christ en croix.
L’abside (partie saillante en demi cercle, ou polygonal) a été construite lors de la restauration de 1861, agrandissant ainsi l’église du 15ème. Elle est de style gothique et couverte d’une voûte en cul-de-four.
Transept gauche, chapelle de la Vierge ; cette chapelle sert de base au clocher (19ème siècle sur la base de celui du 15ème). Transept droit, chapelle dédiée à St Pierre, primitivement à St Joseph. Les 2 autels du transept seraient du 18ème siècle, sans doute de 1758, date gravée sur les fonts baptismaux.
Ces fonts baptismaux ont été creusés dans un bloc monolithe de marbre.
Les lambris qui garnissaient la voûte de l’église au 16ème ont été remplacés par un simple plafond.
Sur le mur de gauche de la nef, le linteau en tuffeau était celui de la porte réservée aux seigneurs.
Le chœur et l’autel ont été dessinés par René Rabault (à la suite du concile de Vatican II, 1962-1965).
Les motifs décoratifs
Un des principaux intérêts de cette église réside dans les motifs décoratifs :
Les têtes de crocodile engoulant les entraits (poutres horizontales) sont sculptées à même le bois et peintes de couleurs vives. On dénombre 4 têtes sur chaque tirant : 1 à chaque extrémité et 2 opposées au centre, séparées par un écu. Ces sculptures sont une allégorie née d’une ancienne légende rapportée d’Orient par les Croisés. Dans l’Antiquité, spécialement en Égypte, on attribuait au crocodile la propriété d’écarter la foudre. Ces crocodiles seraient donc un fétiche contre le feu du ciel. Autre interprétation : le dragon ou crocodile, est terrassé (par le Christ selon l’Apocalypse) parce qu’ils ont la poutre dans la gueule.
Les écus comportant des armoiries (9)
• Situés sur les poinçons (poutres verticales), ils conservent la mémoire des seigneurs qui ont contribué à la reconstruction de l’église fin 15ème, début 16ème siècle. Par exemple (sur la poutre 1 Nord) celui de la famille Pellant qui posséda la seigneurie d’Érigné de 1435 à1535.
- Un écu surmonté d’une couronne royale est celui de la Maison d’Anjou, celui du roi René (1409-1480) (poutre 1 Sud).
- Deux écus portent des lettres séparées par un nœud de cordelettes : sans doute la reproduction de sceaux d’ecclésiastiques (poutre 2 Sud).
- Écu des propriétaires du Jau. En patois vendéen le jau signifie le jard. Il est figuré dans une position de défense. Les propriétaires du Jau, en 1490, furent en procès avec les paroissiens d’Érigné au sujet de droit pâtures. L’écu symbolise peut-être avec ironie, les propriétaires du Jau se mettant en défense contre la paroisse (poutre 4 Nord).
- La croix dominant le monde, sphère d’or emprisonnée dans les liens d’or représente l’Église Catholique (poutre 5 Nord).
Les grotesques / figurines
Ces figurines composent un décor original. Elles sont certainement contemporaines de la reconstruction de l’église à la fin du 15ème siècle (époque des règnes de Charles VII 1422-1461, Louis XI 1461-1483 et Charles VIII 1483-1498).
Elles sont au nombre de 40. Une question subsiste : existe-t-il un lien entre ces 40 figurines qui en fassent un ensemble et la réalisation d’une idée ?
On distingue 2 sortes de figurines :
• celles sculptées à même le bois des sablières (poutre sur laquelle s’accroche la charpente) formant corniche, dans le sens horizontal, de part et d’autre des tirants engoulés par les crocodiles
• les autres, en général de petits bustes, sont placées verticalement au-dessous des tirants et au milieu de l’espace qui sépare deux tirants. Elles sont surmontées d’une planchette carrée ou octogonale. Il est évident qu’elles ont été rapportées. On suppose qu’elles proviennent d’une partie de l’église du 15ème siècle qui a été détruite en 1850. Les petites planchettes qui surmontent les têtes, indiqueraient qu’elles servaient d’appui aux bras ou à la main et proviendraient probablement de la décoration des stalles.
• La plupart sont d’un même sculpteur qui a imprimé à chaque tête un caractère particulier et spécial.
• Les teintes ne sont sans doute pas celles d’origine ; elles ont été l’objet d’une restauration à une époque moderne, car si elles dataient du 15ème, elles seraient plus pâles
• Elles présentent un intérêt à la fois artistique et sociologique.
• Le sculpteur a représenté sans doute non en portraits mais en types, les paroissiens d’Érigné : des adolescents, des hommes et femmes, d’âge mur ou âgés, nobles, seigneurs, bourgeois, manants, mendiant âgé, clercs, chantre, chanteuse… Les types de costumes, de coupe de barbe ou de cheveux datent de la fin du 15ème siècle ou début du 16ème siècle.
• Outre les portraits, quelques allégories : un bœuf, une chèvre (ou un mouton).
La tapisserie
Intitulée Soleil du désert elle est l’œuvre de Madame Tadéi ; elle fut inaugurée en 1985.
Bernadette Jouin, juin 2017